Adapted from his book, “The Patience Stone” the latest project from critically acclaimed novelist and director Atiq Rahimi and Jean-Claude Carrière. The film was shot by award-winning cinematographer Thierry Arborgast (Nikita, The Horseman on the Roof, The Fifth Element) and edited by Academy Award nominee Hervé de Luz (The Pianist, The Ghost Writer, Tell No One). The film takes place in Afghanistan, a country torn apart by a war, where a beautiful woman in her thirties watches over her husband who has fallen into a coma. After years of living under his control, with no voice of her own, she finally has the upper hand. And with that, the safety to reveal to him her deepest desires, pains and secrets, stories she could never share with anyone for fear of retribution.
Her husband has unconsciously become syngué sabour (the patience stone) — a magical black stone that, according to Persian mythology, absorbs the plight of those who confide in it. The woman’s confessions are extraordinary and without restraint: about sex and love, her anger against a man who never understood her, who mistreated her, who never showed her any respect or kindness. The legend of the patience stone also says that when it has absorbed all that it can handle, it explodes, causing the world to end. But, for one brave Afghani woman, it is a risk she’s willing to take to unburden herself and be free.
Jason Price of Icon Vs. Icon recently had the opportunity to speak with director Atiq Rahimi to discuss the latest chapter in his career, the origin of the story of “The Patience Stone” and the challenges of bringing the film to life. The Patience Stone premiered at this year’s Tribeca Film Festival and is being released by Sony Pictures Classics on August 14th, 2013.
This interview was conducted in Atiq Rahimi’s native language. Click here to translate the page!
Merci d’avoir pris le temps de parler avec nous, M Rahimi. Nous avons hâte de faire de la publicité pour votre œuvre puissante et impressionnante. Je voulais fournir un peu de background sur vous à nos lecteurs, donc : Vous êtes à la fois écrivain et cinéaste, mais qu’est-ce qui vous a séduit d’abord dans le monde du cinéma ? Je suis curieux à savoir ce qui vous a intéressé dans le cinéma très tôt dans votre carrière.
Atiq Rahimi: J’ai commencé à écrire très tôt, à partir de l’âge de 13 ans, quand j’étais en Afghanistan. Plus tard, en dehors des textes littéraires, je publiais régulièrement des critiques de film dans un hebdomadaire de jeunesse. Je voyais donc beaucoup de film non seulement dans les salles de cinéma à Kaboul, mais aussi dans les centres culturels, comme Americain Center, Alliance française, Goethe Institut… Cela m’a permis de connaître les grands films de l’histoire de cinéma. Lorsque je suis arrivé en 1985 comme réfugié politique en France, j’ai fait d’abord des études littéraires pour bien apprendre la langue française, puis des études cinématographies, car à cette époque je ne pouvais pas écrire en français. Ecrire dans ma langue maternelle à quoi bon ? Pour qui ?… Donc, le cinéma m’était alors le langage le plus accessible pour m’exprimer, pour raconter le monde. Mais en me lançant dans cette voie, je me suis aperçu que pour faire des films, il fallait d’abord savoir raconter et écrire une histoire.
Aujourd’hui j’écris pour en faire des films, et je fais des films pour pouvoir écrire. Les deux me permettent de vivre mes rêves.
En littérature je cherche des mots pour décrire des émotions, mes sentiments ; au cinéma je cherche des émotions et des sentiments pour interpréter mes mots.
J’adore le travail collectif au cinéma. Je partage tout avec mon équipe, avec mes comédiens pour créer un monde magique avec tant d’artifice, alors que pour écrire je dois me soustraire au monde, rester solitaire avec mes doutes et mes incertitudes…
Quels sont vos premiers souvenirs du cinéma et de la littérature ?
AR : Mon premier souvenir, mon premier émerveillement était plutôt cinématographique que littéraire. J’en ai gardé un très vague souvenir. J’avais six ans, d’après mes parents. En famille, nous sommes allés voir une comédie américaine, Un amour de Coccinelle ! J’ai été enchanté par cette petite voiture douée de raison et qui parlait ! Et puis, ce fut « Pour un poigné de Dollars » ! C’était mon oncle, un fan des films westerns qui m’a amené avec lui dans cette salle de cinéma où il fallait aller en costume, marcher sur un tapis rouge. Je me prenais pour Clint Eastwood! Je jouais, rejouais avec mes camarades ce film dans notre grand jardin, à Kaboul.
La littérature est venue après. Lorsque j’ai lu un petit livre, écrit par un écrivain iranien, Samad Behrangui. Son livre s’appelait « Le petit poisson noir », qui est pour moi l’ancêtre ddu Monde Nemo !
Et quelques années après, j’ai lu Les Misérables de Victor Hugo. Ce fut ma grande découverte de la littérature roamensque.
Qui ou quoi nommeriez-vous comme vos plus grandes influences professionnelles?
AR : Oh, il y en a, et très variés ! Au cinema : Alain Resnais, Ingmar Bergman, Roberto Rossellini, Orsen Wells, Sergio Leone, Wan Kar Wai, Louis Buñuel.
En littérature : Ernest Hemingway, Samuel Beckett, Marguerite Duras, William Faulkner, Rûmi, Rabindranath Tagore.
Comment l’idée pour Pierre de patience vous est venue à l’esprit, comment avez-vous conçu cette histoire ?
AR : En 2005, j’ai été invité pour une manifestation littéraire dans une des grandes villes du pays, nommé Hérat, à l’ouest de l’Afghanistan. Une ville renommée par son passé riche en culture, par ses poètes et ses intellectuels éclairés. Mais une semaine avant mon départ, je reçois un coup de téléphone pour m’annoncer que cette rencontre est annulée à cause de l’assassinat d’une jeune poétesse afghane, Nadia Anjouman, par son mari. Elle était membre actif dans l’organisation de ce festival littéraire. Désespéré, révolté, scandalisé par cette affaire que l’on a qualifiée comme drame familial, je me suis rendu au pays pour faire mon enquête. Mais, on m’a raconté d’autres histoires, encore plus terrifiantes, plus horrifiantes sur les sorts des femmes dans cette contrée soit disant éclairée. Je voulais rencontrer le mari de la poétesse dans la prison. Mais il s’était injecté de l’essence dans les veines. On l’avait transféré à l’hôpital. Je l’ai vu de loin. Il était en coma. À ce moment, je voulais être une femme. M’approcher de lui. Lui murmurer dans les oreilles. Dire tout. Les choses les plus terribles, les plus horribles. Comme son acte. Impossible de m’approcher de lui. Et c’était après cette visite que « les mots m’ont attaqué », comme disait Duras. Je voulais écrire une histoire, une autre, pas celle de la vie de la poétesse. Je voulais écrire une histoire scandaleuse, celle d’une femme qui doit se venger ! Par amour, ou par haine. Avec sa force et ses faiblesses ! Pour cela il me fallait une situation extrême, mais possible, bref une tragédie, au sens classique du terme.
Quand le livre est sorti, est-ce que vous attendiez l’impacte qu’il a eu sur les lecteurs ?
AR : Si on pouvait connaître d’avance l’impacte de ses œuvres sur les lecteurs, le monde des écrivains ne serait que beau !!! J’en rêve.
Racontez-nous un peu vos pensées sur l’approche de faire ce film, sa genèse.
AR : C’est plutôt Jean-Claude Carrière qui, après avoir lu le livre, m’a appelé pour me féliciter et me proposer d’en faire un film. Pour lui, le roman avait une situation dramaturgique très attirante et le personnage féminin lui rappelait d’autres rôles dans des œuvres sur lesquelles il avait travaillé avec Luis Buñuel, auparavant.
Mon but c’était d’abord dépasser le livre, me trahir ! Le grand changement entre le livre et le film, c’est le changement de point de vue : dans le livre, le narrateur est aussi paralytique que l’homme, c’est un narrateur qui ne pense pas. Il est là comme l’homme enfermé dans la chambre. Il écoute, il voit, il raconte. Tout ce qui se passe à l’extérieur et tous les autres personnages sont racontés par la femme. Dans le film, la caméra épouse le point de vue de la femme. Elle bouge avec elle. Elle sort avec elle. Elle se promène avec elle sur les ruines, dans les rues… C’est une autre façon de voir la même histoire.
Le rôle joué par Golshifteh Farahani est très puissante. Qu-est-ce que c’étaient que vos premières réactions envers elle quand vous avez fait sa connaissance pour la première fois ?
AR : J’ai rencontré Golshifteh Farahani la première fois chez Jean-Claude Carrière. Je l’ai trouvée très belle. Il fallait que je fasse des essais avec elle. Car la beauté comme elle peut être très fatale pour un film, si jamais elle remporte sur le personnage et sur l’histoire. Cette beauté doit être incarnée. Golshifteh voulait absolument jouer ce rôle et a passé plusieurs essais pour me convaincre. Comme elle est d’origine iranienne, et non afghane, la première difficulté était d’effacer son accent iranien. Presque un an avant le tournage, elle s’est mise à apprendre l’accent afghan, puis elle a été aidée durant le tournage par l’actrice qui jouait le rôle de la tante et qui, elle, est d’origine afghane. C’était très agréable de travailler avec Golshifteh : elle a très vite compris le personnage, mes intentions de mise en scène et l’importance de la parole dans le film. On a travaillé presque sur chaque mot ensemble. Elle savait que la caméra devait bouger selon ses mots, et non selon ses gestes. Cela a été un défi magnifique.
Y avait-t-il jamais des doutes dans votre esprit, que peut-être que Golshifteh n’était pas la femme pour ce rôle ? Et donc qu’est-ce que vous avez vu en elle qui vous a rassuré qu’elle était en fait la personne pour le rôle ?
AR : J’ai répondu une partie de votre question ci-dessus. En résumé : Elle m’a convaincu aussi bien par son intelligence, son art, son courage que par sa vie et sa beauté!
En réfléchissant, que considérez-vous le plus grand défi dans ce processus de rapporter cette œuvre littéraire à l’écran ?
AR : Filmer la parole de la femme comme action et non pas comme source d’information. C‘est un film de silence et de chuchotements. Il met en scène la parole comme acte, la parole d’une femme qui se révèle à elle-même auprès du corps de son mari, dans une chambre qui n’est pas un huis-clos. Cette chambre est ouverte, elle accueille aussi bien les confessions de la femme que le silence de l’homme, aussi bien les cris des enfants que la barbarie de la guerre à l’extérieur.
Aviez-vous un objectif esthétique pour ce film? C’est-à-dire, avez-vous essayé de capturer quelque chose de stylistique que vous n’aviez pas faite au paravent ?
AR : Mon film précédant, Terre et cendre, était un film de l’extérieur, du paysage, des hommes errants et de l’attente durant le deuil. C’était une esthétique de western. D’ailleurs un critique américain à propos de ce film a dit : « imaginez « En Attendant Godo », filmé par Sergio Leone ! »
« Pierre de patience » est un film de l’intérieur, de la femme, de la sensualité, mais aussi du désastre de la guerre. C’est entre la cruauté et la poésie, entre Rossellini et Bergman.
Qu’est-ce que vous avez appris du temps passé sur ce film ?
AR : Comment filmer une femme.
Comment est-ce que Pierre de patience a été reçu en Afghanistan ?
AR : Mes amis et la jeunesse afghane me soutiennent. Les autres restent silencieux. Une amie, à qui j’avais demandé de me résumer un peu la réaction des femmes afghanes, m’a répondu ceci :
Comment te répondre : cela dépend quelles femmes ? …
– celles engagées dans le travail des ONG, elles trouvent ton film percutant mais long (n’ayant pas l’habitude de long métrages),
– les politiciennes : adorent intimement mais refusent de s’exprimer publiquement et ne soutiendront pas la projection de ton film.
– une partie des femmes et jeunes filles éduquées : ne comprennent pas tout à fait mais n’en font pas un plat
– les jeunes femmes un peu religieuses seraient prêtes à payer pour que l’on te coupe la tête.
Vous êtes à la fois écrivain et cinéaste. Pourriez-vous nous tracer un peu votre évolution dans ce métier dès le début ?
AR : C’est long d’en faire un bilan! Comme j’ai dit plus haut, après avoir quitté mon pays, je ne voulais plus écrire. J’ai fini mes études en 1992, et très vite j’ai été engagé dans une maison de production des films publicitaires, puis j’ai réalisé des films documentaires pour la télévision française. A cette époque, Je gardais beaucoup de distance avec mes origines. Mon premier livre, Terre et cendres a été conçu après dix ans d’exil, en 1996, l’année où les Talibans ont pris le pouvoir à Kaboul, et moi, je venais juste d’avoir ma première enfant. Jusqu’à ces événements, l’Afghanistan n’était qu’un triste souvenir aux recoins de ma mémoire, traumatisée par l’assassinat de mon frère qui avait eu lieu six ans avant, au tout début de la guerre civile en Afghanistan. Durant deux ans, la famille m’avait caché le drame. J’ai donc fait mon deuil plus tard, dans la solitude de l’exil, m’interrogeant sur le silence de ma famille, sur ce qui les contrariait à me parler de la mort de mon frère. J’ai ainsi entamé un dialogue intime et silencieux avec mes proches. Je leur ai écrit Terre et cendres, un espace de deuil où la mort pense et travaille. Elle pense la vie, la mienne ; et elle travaille la langue, celle de ma terre natale, une terre piétinée d’abord sous les bottes de l’Armée Rouge, puis détruite par la guerre fratricide de la vengeance, et pour finir meurtrie sous les fouets de l’armée des ténèbres, les Talibans. Ecrire en persan, ma langue maternelle, était alors le seul moyen pour compatir à la souffrance de mon pays. Et la source d’où coulait l’encre de mon écriture sur les pages mélancoliques de l’exil se nommait : la nostalgie. Un texte intime, donc. Sans avenir, sans espoir aucun. Loin de moi l’idée de le publier un jour. Mais, un jour, c’est fait. Et, un jour, je suis devenu écrivain. Mon livre a eu du succès et les producteurs m’ont demandé d’en faire une adaptation cinématographique !
Comment cette évolutions a-t-elle vous a affecté personnellement ?
AR : Je suis « embarqué » dans l’Histoire de mon pays par le concours de circonstances. Je n’avais d’autre choix qu’entreprendre ce voyage au pays des merveilles des mots et de l’image, et, pour paraphraser R. Tagore, à explorer, découvrir et partager ce qui était de meilleur en moi : écrire en haine de la guerre.
Pensez-vous qu’il existe des idées fausses de vous ?
AR : Il faudrait que j’en connaisse d’abord les vraies !
Qu’attendons-nous de vous prochainement? Travaillez-vous sur d’autres projets en ce moment-ci ?
AR : Je viens de terminer avec Jean-Claude Carrière un nouveau scénario d’un film que je tournerai en janvier, et déjà nous sommes en train d’adapter un roman sur la mort d’Alexandre le Grand.
Et deux livres : Méditations sur l’exil, puis un livre d’autodérision !
Qu’auriez-vous comme conseil pour des jeunes artistes dans le monde de l’écriture et du cinéma ?
AR : D’abord : avoir de la passion et la patience !
Ensuite : Pour écrire, il faut croire en mots, pour filmer il faut douter de l’image, et vice versa.
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